Un voyageur qui prend un vol intérieur aux États-Unis doit avoir en main un permis de conduire ou une pièce d’identité avec photo appropriée. Un voyageur qui souhaite partir à l’international doit présenter un passeport. Les passagers doivent également posséder des cartes d’embarquement. Mais si tout cela n’était pas nécessaire, si le visage, les yeux ou l’empreinte digitale d’une personne pouvaient lui permettre de monter à bord d’un avion? Il serait alors bien plus facile et sécuritaire de voyager. En effet, s’il est possible de falsifier un passeport ou un permis de conduire, il est beaucoup plus difficile de tromper la technologie biométrique, comme la reconnaissance faciale ou la lecture d’empreintes rétiniennes ou digitales.

Dans la vision de l’avenir qu’a l’industrie du voyage, les documents actuels seraient remplacés par des données biométriques vérifiées. Il s’agirait de bien plus que d’utiliser la biométrie au lieu d’un passeport ou d’une carte d’embarquement. Le recours à cette technologie rendrait inutiles les billets d’avion et de train ainsi que les contrôles d’identité pour l’enregistrement à l’hôtel et la location de voitures. La biométrie servirait essentiellement de pièce d’identité et de document de voyage au passager à toutes les étapes de son déplacement.

La biométrie est déjà présente à certains des aéroports les plus achalandés au monde, où le grand volume de passagers encourage la recherche d’efficiences. Aux États-Unis, par exemple, les compagnies aériennes peuvent, à l’aéroport international John F. Kennedy, profiter de la technologie de reconnaissance faciale de l’U.S. Customs and Border Protection pour accélérer les processus d’enregistrement, de dépôt des bagages et d’embarquement des voyageurs. L’an dernier, Delta a ouvert la première aérogare offrant une expérience biométrique « du trottoir à l’embarquement » à l’aéroport international Hartsfield-Jackson d’Atlanta, où il est possible d’utiliser la reconnaissance faciale de l’enregistrement jusqu’au retrait des bagages.

Jusqu’à tout récemment, les pays avaient recours à la biométrie pour empêcher les terroristes et d’autres personnes de traverser leurs frontières. Le système de reconnaissance faciale des États-Unis analyse plus de cent points de référence sur un visage. Le Traveler Verification Service est devenu la norme à laquelle aspirent des douzaines de pays qui effectuent le contrôle des personnes se présentant à leurs frontières.

Bien que des groupes comme l’Association internationale du transport aérien voient la biométrie comme un outil à employer à l’aéroport, l’ensemble de l’industrie du voyage, par l’intermédiaire d’organisations comme le World Travel & Tourism Council, veut intégrer la biométrie, en particulier la reconnaissance faciale, à toute l’expérience de voyage, de la réservation à l’arrivée, et ce, qu’il s’agisse de prendre en charge un véhicule, de réserver une chambre d’hôtel ou de monter à bord d’un avion, d’un train ou d’un bateau. Une telle innovation permettrait sans doute d’encourager davantage de gens à voyager tout en évitant qu’une augmentation considérable des ressources soit nécessaire pour faire face à cette croissance. Elle rendrait également plus efficace un système qui met actuellement l’accent sur la sécurité plutôt que sur la simplification du déplacement.

Un chiffrement amélioré

Dans le cadre de leur expérience de déplacement, les passagers doivent constamment montrer leurs documents de voyage. C’est pourquoi l’industrie étudie actuellement la possibilité de stocker les renseignements qu’ils contiennent dans les téléphones intelligents des voyageurs. Ceux-ci seraient libres de partager leurs marqueurs biométriques avec les fournisseurs de services de voyage de leur choix et n’auraient alors plus à s’inquiéter de perdre leurs pièces d’identité et leurs billets.

Bien entendu, il y a un défi : conserver ces renseignements en sécurité et limiter leur accès aux utilisateurs autorisés tout en permettant l’interopérabilité entre fournisseurs. Des systèmes de chiffrement de plus en plus sophistiqués sont en cours de développement afin de protéger les données biométriques du piratage. Les outils de chiffrement peuvent également agir à titre de dépôts où il est possible de consulter les préférences des voyageurs, une fonctionnalité qui encouragera sans doute les fournisseurs à personnaliser leur offre. Ces outils sont aussi en mesure de surveiller les retards. Ainsi, le système pourra, par exemple, avertir l’hôtel ou l’entreprise de location de voitures si un voyageur est touché par un retard à l’aéroport.

Au-delà des aéroports

La vérification numérique de l’identité deviendrait un filet de secours amélioré. Les entreprises de location de voitures, les hôtels, les trains, les autobus et les navires de croisière doivent actuellement vérifier eux-mêmes l’identité des voyageurs. Une entreprise de location de voitures, par exemple, doit s’assurer manuellement que le permis présenté au comptoir est valide.

Malgré la disponibilité de la technologie, les craintes à l’égard de la confidentialité et de la sécurité des données poussent les autorités et les dirigeants à faire preuve de prudence. La TSA a récemment annoncé qu’elle ne rendrait pas obligatoire la vérification de l’identité par la biométrie, bien que l’agence ait développé des projets pilotes pour augmenter l’efficacité de la technologie. Cette annonce pourrait être liée au vol de presque cent mille photos et plaques d’immatriculation de voyageurs collectées par la Customs and Border Protection et stockées dans la base de données d’un fournisseur.

Public c. privé

De quelle façon la vérification numérique de l’identité évoluera-t-elle? Certains imaginent un modèle contrôlé ou établi par le gouvernement, tandis que d’autres voient plutôt un modèle privé sur abonnement. Chaque modèle devra reconnaître que tous les voyageurs ne voudront pas partager leurs renseignements personnels et permettre à tous de refuser que l’on accède à ceux-ci.

Le WTTC a cerné 53 mesures déjà en place pour mettre en œuvre la biométrie. Les systèmes déployés existent principalement pour faciliter le contrôle aux frontières ainsi qu’aux aéroports des États-Unis, de l’UE, de l’Asie du Sud-Est et des Caraïbes. Des projets pilotes à certains des aéroports de ces endroits permettent le traitement des bagages, l’accès aux salons et l’embarquement. Pendant ce temps, des fournisseurs planifient réaliser des tests pour voir si la portée des systèmes existants pourrait être étendue afin qu’ils soient également adoptés par des fournisseurs hors des aéroports. Le but est de solidifier le dossier des voyages intégrés de bout en bout et de lancer une adoption mondiale.

S’il n’existe aucun consensus vis-à-vis d’une solution unique, l’industrie du voyage cherche à collaborer au-delà des frontières et avec les entreprises et les gouvernements pour réduire, à l’avenir, les itérations auxquelles les voyageurs font face. La bonne nouvelle : les voyageurs ont déjà un aperçu des avantages que leur offre la biométrie à l’égard de leur expérience de voyage et, au fur et à mesure qu’ils deviennent plus à l’aise avec cette technologie, il pourrait en être de même pour les autorités.


Ce texte est une traduction de l’anglais d’un article d’Oliver Oyman, d’Alex Hill et d’Helena Bononi paru sur le site businesstravelnews.com le 7 octobre 2019. Pour consulter la publication originale, veuillez cliquer ici.